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AXE N°1 - État et justice sociale

Philosophie sociale et politique contemporaine & histoire des idées sociales et politiques    

 

1/ Objet

L’axe 1 du CRHI déploie une interrogation de philosophie sociale, politique et juridique sur l’État social. Conformément à l’identité du laboratoire, les réflexions de philosophie politique normative contemporaine qui y sont menées, sur les fondements de l’État social ainsi que sur sur les principes de justice sociale, prennent appui sur l’histoire des idées sociales et politiques, mais une histoire des idées notamment renouvelée par les méthodes des humanités numériques et les approches féministes. Les transformations actuelles de l’État social et des systèmes de protection sociale font surgir un problème d’ordre philosophique.
 
La crise contemporaine de l’État social n’affecte pas seulement son organisation économique ou administrative, mais également – et plus radicalement – les fondements de la solidarité sociale et de la justice sociale qu’il organise sous forme de droits sociaux. L’axe 1 du CRHI, qui regroupe des travaux de philosophie politique sur la forme politique qu’est l’État et des travaux de philosophie sociale sur la justice, entend s’interroger sur ce que peut et doit être un État juste garant de droits politiques, mais aussi sociaux.
 

2/ Positionnement

L’État social a fait l’objet de travaux philosophiques récents – signalons, à titre d’exemples, les propositions de Pierre Rosanvallon en faveur d’un État actif-providence appuyé sur le développement de la citoyenneté sociale, les analyses de Nancy Fraser appelant à articuler politique de la reconnaissance et politique de la redistribution, celles d’Axel Honneth visant à émanciper le socialisme de l’industrialisme en pensant son fondement éthique, ou encore celles de Jürgen Habermas théorisant ce que pourrait être une Europe des peuples.  
 
Les recherches menées au sein de l’axe 1 du CRHI s’inscrivent dans ce domaine d’études en y apportant une contribution spécifique à quatre titres principaux. 
 
1/ Bien que conduisant une réflexion philosophique sur les inégalités sociales, les chercheurs de l’axe 1 défendent une approche différenciée et spécialisée des différents types d’inégalités sociales. Ainsi, par exemple, un ensemble de travaux, centrés autour du projet ANR PHILHERIT (Philosophie de l'héritage / Quels fondements normatifs pour une juste régulation de l'héritage ?), se concentrent sur ce type particulier d’inégalités sociales que sont les inégalités économiques liées à la naissance, institutionnalisées et reproduites par les transmissions successorales. Toujours dans cette perspective, des projets de recherche sont en cours de construction qui visent à interroger les enjeux écologiques contemporains à la lumière du mode de transmission de la propriété et entendent ainsi explorer les pistes actuelles d’expérimentation et de réflexion qui décèlent dans l’institution de l’héritage un outil possible de transformation écologique et de juste partage de la Terre entre différentes générations.
 
2/ Même si les recherches conduites dans l’axe 1 relèvent de la philosophie normative, elles n’adoptent pas, à la manière de certaines théories contemporaines de la justice, une démarche déductive partant des principes idéaux que la société devrait respecter pour pouvoir être dite juste et en déduisant les dispositifs institutionnels concrets qui en permettraient la réalisation. L’idée qui structure les recherches de l’axe 1 est qu’une telle démarche normative déductive demeure trop éloignée de la réalité sociale, économique et juridique qu’elle se propose de réformer. Elle manque en particulier la distorsion qui peut s’introduire entre les effets escomptés d’une proposition normative et ses effets réels une fois appliquée. Aussi les recherches de l’axe 1 entendent initier, à rebours des approches déductives et formalistes de la justice, une philosophie normative inductive et par là même « appliquée ». Il s’agit de partir des dispositifs institutionnels concrets, appréhendés dans leur historicité, dans leur technicité et dans leur matérialité et d’analyser les principes de justice qui les sous-tendent : par exemple, telle règle de dévolution successorale, telle pratique notariale déterminant son application, telle formule de calcul du droit à l’indemnisation chômage, tel article du Code de la propriété intellectuelle, tel mécanisme économique de détermination du prix « juste », telle politique pénitentiaire, etc. La philosophie normative appliquée que nous entendons initier est par là même une philosophie des sciences sociales, c’est- à-dire une philosophie qui se met à l’école de ce que les différentes sciences sociales nous apprennent de ces dispositifs institutionnels. C’est la raison pour laquelle les recherches de l’axe 1 appellent une forte interdisciplinarité et que ses membres entretiennent des relations de recherche étroites avec des chercheurs en économie, en droit, en histoire du droit, en science politique, en sociologie, et en histoire, d’autres laboratoires à Université Côte d’Azur et au-delà.
 
3/ La réflexion philosophique menée au sein de l’axe 1 sur l’État social et sur les principes de la justice sociale, tout en étant ancrée dans des questionnements contemporains, prend appui, selon une tradition propre au CRHI, sur l’histoire des idées, en particulier sur l’histoire des idées sociales et politiques des XVIIIe et XIXe siècles. Ainsi des travaux sont menés sur la généalogie du libéralisme économique, depuis Hume ou Smith jusqu’à Hayek ou Friedman, qui entendent interroger de manière critique la distinction conceptuelle contemporaine entre justice et justice sociale à l’aune de la distinction classique entre justice et bienveillance. Ainsi également, au sein du projet ANR PHILHERIT, les recherches normatives contemporaines entreprises, qui visent à introduire dans les théories contemporaines de la justice sociale la prise en compte des inégalités matérielles liées à la naissance, sont articulées à – et même prennent appui sur – une enquête archéologique exhumant les nombreuses pensées du XIXe siècle sur l’héritage, aujourd’hui largement oubliées.
 
C'est dans cette perspective que l'axe 1 du CRHI croise plusieurs des recherches entreprises au sein de l'axe 3. Ainsi du geste consistant à explorer les théories de la Justice (notamment autour de la figure de John Rawls) et leurs méthodes (notamment l’équilibre réfléchi) en rapport avec les éthiques et politiques du care — deux types d’approches classiquement considérés, à tort, comme opposées. Ces croisements permettent à la fois de resituer certains problèmes philosophiques classiquement ancrés dans le risque (par exemple sur les questions environnementales ou technologiques — comme dans le projet européen Miracle, porté par l’axe 3 du laboratoire, et qui s’appuie sur les éthiques du care pour réfléchir la santé algorithmique), et d’ouvrir autrement les perspectives du CRHI sur les questions des personnes minorisées en s’appuyant notamment sur les approches féministes, et sur la question des générations futures.
 
4/ Forts des réflexions sur l’histoire des idées, menées depuis plusieurs années au sein du CRHI, les membres de l’axe 1 pratiquent une histoire des idées sociales et politiques renouvelée, dans ses méthodes et dans ses résultats, par les humanités numériques. Soutenu par l’EUR CREATES et par l’Académie 5 de l’Idex d’Université Côte d’Azur, l’axe 1 du CRHI s'efforce d'articuler philosophie sociale et politique et humanités numériques. En particulier, dans le cadre du projet ANR PHILHERIT, au moyen de la construction d’une base de données textuelles comprenant 800 000 pages d’ouvrages numérisés sur Gallica traitant spécifiquement de l’héritage, au moyen de la constitution, en partenariat avec la Bibliothèque Nationale de France, d’une bibliothèque virtuelle des pensées de l’héritage, des nouvelles manières de faire de la philosophie politique sont en train d’émerger que nous nous efforçons de penser méthodologiquement et théoriquement.    
 

3/ Financements

Projets financés en cours :

- Projet ANR JCJC PHILHERIT - Philosophie de l'héritage / Quels fondements normatifs pour une juste régulation de l'héritage ? (Agence Nationale de la Recherche, 2022-2026)

- Partenariat Hubert Curien Tournesol Philosophie de l'héritage: du socialisme rationnel belge au basic capital (Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères & MESRI, 2022-2023)

- Honorary Fair Inheritance Fellowship de la Chaire Hoover d’éthique économique et sociale de l’Université Catholique de Louvain

- Projet Réformer l’héritage aujourd’hui. Essai de cartographie dynamique (Académie 5 de l'Idex UCAjedi de l’Université Côte d’Azur, 2022-2023)

Projets financés passés :

- Projet LITTHERIT - Les conceptualisations de l’héritage dans la littérature française du XIXe siècle (financement d’un stage de recherche de 3 mois, EUR CREATES - Université Côte d’Azur, 2022)

- Projet Philosophie de l'héritage et humanités numériques (Académie 5 de l'Idex UCAjedi de l’Université Côte d’Azur, 2021-2022)

- Chaire d’excellence Reconsidering Inheritance du programme de Recherches Avancées – IDEX UCAjedi de l’Université Côte d’Azur  (2019-2021)

 

4/ Activités

- Workshops Penser l'héritage 

- Ateliers Philosophie du droit successoral aux congrès annuels de la Société française pour la philosophie et la théorie juridiques et politiques (SFPJ)

- Cycle de Journées d’études annuelles Philosopher en prison

 

5/ Partenariats nationaux et internationaux

- Convention Gallica – Marque blanche avec la Bibliothèque Nationale de France

- Partenariat de recherche avec le Centre de Théorie Politique de l’Université Libre de Bruxelles (Belgique)

- Partenariat de recherche avec la Chaire Hoover d’éthique économique et sociale de l’Université Catholique de Louvain (Belgique)